Une université de l’esprit

Entretien
Théâtre

Une université de l’esprit

Entretien avec Olivier Cadiot

Le 10 Mai 2013

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Couverture du numéro 117-118 - Utopies contemporaines
117 – 118

JEAN-LOUIS PERRIER : Quand on vous dit A‑vi-gnon, qu’est-ce que cela vous évoque ?

Olivi­er Cadiot : Des choses con­tra­dic­toires, parce que j’ai vécu trois Avi­gnon très dif­férents. Le pre­mier, en 1989, a été dif­fi­cile. J’avais écrit le livret du pre­mier opéra de Pas­cal Dusapin, ROMÉO & JULIETTE. Je me suis retrou­vé para­chuté dans la chaleur d’Avignon sans aucun préal­able, ça a été épou­vantable. Je n’avais pas prévu cette mon­dan­ité, la vio­lence de la cri­tique, l’importance que se don­nent les artistes, cette sen­sa­tion d’être plongé dans une bulle déli­rante. Avi­gnon fait un peu peur, comme tous les lieux où des pas­sion­nés se retrou­vent en masse, comme des motards autour d’un cir­cuit ou un camp d’été pour pêcheurs à la mouche. Le plus fati­gant c’est que tout le monde a l’impression depuis 1947 d’avoir « son Avi­gnon », un peu comme des gens qui vous expliquent que la Côte d’Azur a bien changé. Je venais à peine de pub­li­er mon pre­mier livre, L’ART POETIC’, je fai­sais beau­coup de lec­tures publiques et j’étais loin des comé­di­ens et du monde du théâtre. J’avais passé trois années extra­or­di­naires avec Dusapin à pré­par­er cet opéra, loin de tout, le choc a été rude. Ça été une expéri­ence impor­tante, et même si je pense que Dusapin a réus­si une œuvre mag­nifique, j’ai com­pris à ce moment-là que je n’étais pas doué pour la scène. Que je ne savais pas rêver d’un espace, d‘un planch­er, d’une estrade avec des comé­di­ens qui se baladent dessus, sauf peut-être les mono­logues, et que je préférais écrire des romans, avec mille scènes, et les con­fi­er à un met­teur en scène, comme je l’ai fait ensuite avec Ludovic Lagarde.

J.-L. P. : C omment s’est passé votre deux­ième Avi­gnon ?

O. C. : Ça été l’expérience inverse. C’était à l’arrivée d’Hortense Archam­bault et de Vin­cent Bau­driller, 2004, ils avaient invité Ludovic Lagarde à la Char­treuse de Vil­leneuve-lès-Avi­gnon à repren­dre LE COLONEL DES ZOUAVES et à créer FAIRY QUEEN. On était loin du Palais des Papes. On a passé une par­tie de l’hiver à la Char­treuse. On pou­vait jouer aux moines. Feu de bois dans les cel­lules, soupe de légume à la table com­mune. On est resté tran­quilles là-bas pen­dant le fes­ti­val, acteurs, dra­maturges et amis. On avait cha­cun un minus­cule petit jardin cerné de murs avec un arbre au cen­tre. Ça m’a réc­on­cil­ié avec Avi­gnon. Et puis c’est à ce moment que s’est con­stru­ite une rela­tion avec l’équipe du Fes­ti­val. J’y suis revenu plusieurs fois pour faire des lec­tures et en 2010 je suis passé en pre­mière ligne, cette fois invité à partager un pro­jet plus pro­fond et de longue haleine.

J.-L. P. : Donc ça ne vous a pas éton­né qu’ils vous pro­posent d’être artiste asso­cié ?

O. C. : J’ai été sidéré par leur demande. C’était tout à fait inhab­ituel de pro­pos­er ce rôle à un écrivain. D’ailleurs, cela a posé, je crois, de nou­veaux prob­lèmes aux directeurs du Fes­ti­val qui ont plus sou­vent l’habitude de tra­vailler directe­ment avec des met­teurs en scènes ou des choré­graphes. Des artistes pro­duc­teurs. Un écrivain qui ne met pas directe­ment ses textes en scène, reste en amont ou en retrait des pro­duc­tions. Ça ne veut pas dire que je ne par­ticipe pas à ma manière à toutes les étapes de réal­i­sa­tion d’un pro­jet, mais que je n’ai pas le même rap­port au temps d’exécution. Il se trou­ve en plus que je suis assez lent. Mais ça a fonc­tion­né, parce que Hort­ense Archam­bault et Vin­cent Bau­driller m’ont fait cette propo­si­tion très tôt. J’ai passé du temps avec eux à pré­par­er l’édition. Ça m’a per­mis de ren­tr­er plus calme­ment dans ce pro­gramme et de pou­voir écrire pour la cir­con­stance dans des délais qui me con­vi­en­nent. J’ai eu le temps d’écrire UN MAGE EN ÉTÉ qui a été créé à la fin du Fes­ti­val avec Lau­rent Poitre­naux dirigé par Ludovic Lagarde.

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#117-118
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